Le 8 avril, le Consulat général a organisé un symposium intitulé « Naviguer dans la nouvelle normalité : Les médias et la démocratie dans une période difficile. » Organisée en partenariat avec la Fondation pour le journalisme canadien, cette conférence d’une demi-journée a réuni des journalistes, des dirigeants de médias, des universitaires et des représentants de la société civile pour discuter de la manière dont le secteur réagit aux technologies perturbatrices, à la polarisation politique et à la baisse des revenus.
Dans son discours d’ouverture, le consul général Tom Clark a déclaré que les médias et la démocratie sont confrontés à des menaces graves et sans précédent. consul général Clark a ensuite attiré l’attention des participants sur l’engagement permanent du gouvernement du Canada à lutter contre la désinformation étrangère afin de protéger l’intégrité électorale tout en défendant les droits de l’homme et les libertés fondamentales.
C'est un événement aussi important qu'opportun. Plus de quatre milliards de personnes dans le monde se rendront aux urnes cette année. Un simple coup d'œil aux titres des journaux vous donnera une bonne idée de ce qui est en jeu.
Le consul général Tom Clark
Conversation avec l’éditeur du New York Times, AG Sulzberger
Le programme officiel a débuté par une discussion au coin du feu entre AG Sulzberger, président et éditeur du New York Times, et Emily Bell, fondatrice du Tow Center for Digital Journalism à l’université de Columbia. M. Sulzberger a exposé quatre pressions existentielles auxquelles est confrontée l’industrie du journalisme, à savoir
- le modèle économique
- la polarisation politique
- les droits et la sécurité des journalistes
- l’intelligence artificielle
Dans l’ensemble, M. Sulzberger estime que le secteur de l’information nationale aux États-Unis s’est stabilisé sur le plan économique, tandis que l’information locale reste « incroyablement vulnérable. »
M. Sulzberger a évoqué la manière dont le Times s’est adapté à l’essor d’Internet, depuis les temps difficiles où le journal a contracté un prêt sur salaire en 2009 jusqu’à l’atteinte d’un pic de 10 millions d’abonnés numériques en 2023. Attribuant le succès du journal à « l’investissement dans un journalisme de qualité à chaque fois que cela est possible », il a déclaré que ce principe continuerait à guider les décisions commerciales du journal alors que le monde entre dans une nouvelle ère de l’IA.
Les défis de l’IA et de la désinformation
Katerina Eva Matsa, directrice de la recherche sur les nouvelles et l’information au Pew Research Center, a animé un panel sur l’impact de l’IA générative sur les salles de rédaction, les élections et la propagation de la désinformation.
Brian Stelter, correspondant spécial de Vanity Fair, a attribué le manque de confiance dans les médias en partie à l’effondrement des médias locaux aux États-Unis. « Les gens ne se voient pas reflétés dans les nouvelles parce que les nouvelles locales ont été tellement vidées de leur substance », a-t-il déclaré. « Ils ne se sentent pas informés ou couverts. Ils font moins confiance aux médias. »
Aimee Rinehart, responsable du programme « Local News and AI» à l’Associated Press, a qualifié l’IA de « grande victoire pour les petites salles de rédaction », affirmant que les petites organisations seront en mesure d’exploiter les outils d’IA pour l’analyse des données et l’optimisation de l’efficacité.
Joseph Yun, architecte de l’IA et de l’innovation à l’université de Pittsburgh, a fait part de ses inquiétudes quant à la manière dont l’IA agentique – des systèmes autonomes qui peuvent agir de manière indépendante, prendre des décisions et apprendre de leur environnement – façonnera les futures élections.
M. Yun a déclaré : « À un moment donné, l’IA agentique sera la norme, ce qui accélérera considérablement la désinformation. »
M. Yun s’est également dit très préoccupé par la concentration des talents en matière d’IA dans le secteur privé, attirant l’attention sur le manque d’incitations à travailler dans les universités et les administrations publiques sur des solutions techniques d’IA conformes à l’intérêt public.
Repenser le modèle d’entreprise
Evan Solomon, éditeur de GZERO Media, s’est entretenu avec Nicholas Johnston, éditeur d’Axios, Gina Chua, rédactrice en chef de Semafor, et S. Mitra Kalita, PDG d’URL Media, sur la manière dont ces médias numériques réinventent le modèle commercial traditionnel de l’information et se positionnent pour réussir à l’ère de l’IA.
Les trois panélistes ont convenu que des flux de revenus diversifiés sont essentiels pour construire une entreprise de médias stable et prospère, avec un équilibre entre les revenus provenant des abonnements, de la publicité et des événements.
En ce qui concerne l’impact des médias sociaux sur le modèle d’entreprise, M. Johnston a déclaré que l’approche d’Axios consistait à traiter les plateformes comme un outil, plutôt que comme un partenaire ou un adversaire : «Je préfère m’approprier la relation avec le public plutôt que de compter sur les plateformes pour la faciliter. »
Je préfère m'approprier la relation avec le public plutôt que de compter sur les plateformes pour la faciliter.
Nicholas Johnston, Axios
Les panélistes ont également abordé le rôle du gouvernement dans le financement de l’information, notamment par le biais de lois telles que le projet de loi C-18. Mme Kalita s’est inquiétée du fait que ces mesures profiteraient aux grands médias qui peuvent réaliser des économies d’échelle sur Internet plutôt qu’aux médias locaux qui sont souvent les premiers à publier des informations.
Elle a toutefois exprimé son soutien à d’autres mesures telles que les allègements fiscaux pour l’emploi de journalistes ou le projet de loi S6495A du Sénat de l’État de New York, qui obligera les agences de l’État à dépenser une partie de leur budget publicitaire dans des médias locaux et communautaires.
Le moment est venu d'exiger une remise à zéro et une réinvention bien plus importantes.
S. Mitra Kalita
En ce qui concerne l’impact de l’IA sur le secteur de l’information, tous les trois ont constaté que de nombreuses leçons tirées de l’émergence de l’internet pouvaient être appliquées à cette nouvelle ère. M. Kalita a déclaré : « Ce n’est pas le moment de revenir en arrière, mais d’exiger une réinitialisation et une réinvention beaucoup plus importantes. »
Construisons une salle de rédaction cybernétique. Faisons en sorte que les deux parties donnent le meilleur d'elles-mêmes.
Gina Chua, Semafor
Selon Mme Chua, la question clé que devraient se poser les organisations de médias est de savoir comment sauver le journalisme et l’information d’intérêt public, et non pas comment sauver les emplois des journalistes. Mme Chua a déclaré : « Construisons une salle de rédaction cybernétique, où les machines n’essaieront pas d’être de mauvais humains et où les humains n’essaieront pas d’être de mauvaises machines. Il faut que les deux parties donnent le meilleur d’elles-mêmes. »
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