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Le nouveau film documentaire Fanny rend hommage au droit des femmes de jouer de la musique rock

Bonnie Raitt les a désignées comme le tout premier groupe rock entièrement féminin qui sait vraiment jouer. Le New York Times les a appelées les sœurs musicales de Crosby, Stills, Nash and Young. Mais malgré cinq albums acclamés par la critique, des admirateurs fidèles et des tournées effectuées avec des groupes comme Chicago et Jethro Tull, l’impact de Fanny sur le monde de la musique s’est perdu dans l’histoire… jusqu’à maintenant.

Cinquante ans après s’être frayé une voie dans l’industrie de la musique, Fanny est de retour avec un nouveau contrat de disque accompagné d’un film documentaire. Le documentaire Fanny: The Right to Rock présente des images d’archive exposant le passé du groupe dans l’univers du rock, entremêlées avec des séquences de son prochain album et des entrevues avec des légendes de la musique, notamment Joe Elliott de Def Leppard, Kathy Valentine du groupe The Go-Go’s, Todd Rundgren ainsi qu’Earl Slick, guitariste de David Bowie.

Le film documentaire a remporté un prix « choix du public » (Audience Awards) du festival Hot Docs de l’année en cours, et sa première new-yorkaise a eu lieu au festival DOC NYC la même année. Les membres du groupe se trouvaient sur place pour faire une prestation après le visionnement.

Nous avons discuté avec la cinéaste Bobbi Jo Hart pour en apprendre davantage en ce qui concerne les premières luttes de Fanny contre les obstacles liés à l’origine ethnique, au sexisme et à la sexualité dans l’industrie musicale, le retour du groupe et ce que son histoire symbolise pour les musiciennes en devenir.

Cette première au DOC NYC fait partie de la série Voices of Canada parrainée par le Consulat général du Canada à New York.

Crédit photo : Linda Wolf

Comment une personne possédant un diplôme en études internationales en vient-elle à réaliser des films documentaires? Quels sont les points en commun entre les deux disciplines?

Les deux consistent à honorer notre humanité commune grâce à des histoires, et je suis attirée par les histoires qui touchent les communautés marginalisées. Toute ma vie, je me suis servie de la photographie pour immortaliser des souvenirs. Au départ, je croyais que j’allais travailler pour le Corps des volontaires de la paix ou l’Organisation des Nations Unies. En 1996 toutefois, j’ai rencontré un documentariste qui travaillait à un projet au sujet des droits de la personne. J’ai aussitôt été séduite.

Vous avez décrit votre approche de la réalisation cinématographique comme suit : « se taire et capter la vie comme elle se déroule devant soi ». Comment cette approche s’est-elle implantée dans la réalisation de Fanny? Quelles idées ou surprises a-t-elle occasionnées?

La chanteuse principale, June Millington, m’a passé un coup de fil sorti de nulle part pour me dire que le groupe avait signé un nouveau contrat de disque et que l’enregistrement aurait lieu trois semaines plus tard. C’était la première fois depuis des années que les membres allaient jouer ensemble. Je me suis alors précipitée dans ma voiture avec mon équipement et je me suis rendue au Massachusetts. Nous sommes restés dans un AirBnB juste en face du lieu d’enregistrement et nous avons filmé tous les jours pendant six jours.

Quiconque travaille à des films documentaires sait que les choses ne fonctionnent jamais comme prévu. Durant le tournage, Jean Millington a souffert d’un grave problème de santé et le groupe a dû attendre un an avant qu’elle se rétablisse. ~Bobbi Jo Hart

Au départ, je pensais qu’elles allaient enregistrer un album et que le film se terminerait avec les images du groupe qui remonte sur scène. Mais quiconque travaille sur des films documentaires sait que les choses ne fonctionnent jamais comme prévu. Durant le tournage, Jean Millington a souffert d’un grave problème de santé qui a empêché le groupe de partir en tournée. C’était avant même que survienne la pandémie de COVID-19. Le groupe a dû attendre un an avant qu’elle se rétablisse, et il a fallu changer une partie de l’intrigue du film.

Quel a été l’impact de ce groupe sur les autres musiciens à l’époque?

C’était fantastique de voir autant d’autres musiciens adorer Fanny. Joe Elliott de Def Leppard a découvert le groupe à 12 ans grâce à un disque souple que contenait un numéro du magazine Music Express. Dans le film, sa réaction est tellement profonde. Il a conservé ce disque souple.

Fanny a ouvert la voie sur bien des aspects. Mais d’autres sujets, comme l’homosexualité, sont demeurés tabous. Comment le groupe s’est-il orienté dans ce contexte? De quelle manière les membres du groupe ont-elles été touchées sur le plan personnel?

La force intérieure que ces femmes ont développée au fil du temps est inspirante et bouleversante. Prenez Alice de Burh, par exemple. C’est une femme avec grande une force de caractère, mais le récit de son affirmation comme lesbienne et de son internement dans un hôpital psychiatrique au cours des années 1980 est à glacer le sang.

La force intérieure que ces femmes ont développée au fil du temps est inspirante et bouleversante. ~Bobbi Jo Hart

Aussi, il y a eu la difficulté d’avoir grandi en Californie. Les parents ne voulaient pas que leurs fils fréquentent les musiciennes de Fanny, puisqu’elles n’étaient pas blanches. Cela dit, la presse musicale blanche ne faisait même pas allusion à l’origine ethnique. La plupart des médias américains s’intéressaient plutôt au caractère inédit d’un groupe composé entièrement de femmes. La question qu’elles se faisaient poser le plus souvent était : « Qu’est-ce que ça fait d’être une femme qui joue un instrument de musique? »

Certains critiques musicaux leur ont donné de bonnes évaluations. Steve Lichtenberg, du New York Times, les a appelées les sœurs musicales de Crosby, Stills, Nash and Young. Pourtant, personne ne se souciait de savoir qu’elles étaient autodidactes et qu’elles avaient appris à jouer sur des ukulélés.

Source : Fannythemovie.com

Fanny, c’est plus qu’une histoire à propos de musiciennes talentueuses. Comment le sujet s’intègre-t-il dans les dialogues plus généraux sur la culture et la politique?

Une chose que j’adore de ce film, c’est qu’il souligne de nombreuses composantes de leur identité : ce sont des musiciennes philippines, queers et autodidactes qui ont fondé elles-mêmes un groupe. Elles sont en avance sur leur temps. Par exemple, comparez-les avec The Runaways (un groupe entièrement féminin qui a émergé après Fanny). Ce groupe a été constitué par un producteur masculin.

Pour moi, en tant que documentariste, il est également important de réparer les injustices du passé. C’est ainsi que des changements bénéfiques se produisent en Amérique. Les droits ne s’obtiennent pas sans effort. Il faut se battre pour les acquérir.~Bobbi Jo Hart

Pour moi, en tant que documentariste, il est également important de réparer les injustices du passé. C’est ainsi que des changements bénéfiques se produisent en Amérique. Les droits ne s’obtiennent pas sans effort. Il faut se battre pour les acquérir. Voilà pourquoi nous avons employé la statue de la Liberté sur l’affiche du film. Elle représente les gens de toutes les couleurs, tendances et identités. L’ajout du sous-titre The Right to Rock est révélateur à cet égard. Tout comme les femmes ont lutté pour le droit de vote, Fanny a lutté pour le droit des femmes de jouer du rock. Le rock’n’roll constitue une métaphore qui représente l’acte de trouver sa voix et d’en faire usage de la manière la plus puissante possible pour que les gens vous entendent.

À mon avis, Fanny est un hommage à des femmes qui utilisent leur voix, surmontent des obstacles majeurs et font de la musique rock, même après avoir fêté leur 70e anniversaire. C’est un hommage à leur identité et c’est tout ce que j’ai accompli.

Depuis la première apparition de Fanny sur scène, les musiciennes ont fait beaucoup de progrès. Cependant, plusieurs d’entre elles continuent à être confrontées aux mêmes obstacles que les membres de Fanny ont connus. Qu’est-ce que cela vous indique au sujet de la place des artistes au féminin et des difficultés qu’elles continuent à affronter?

Les filles et les femmes doivent poursuivre le bal. Huit pour cent seulement des personnes intronisées au panthéon du rock sont des femmes. Les changements ne sont pas linéaires; ils se produisent en vagues. De nos jours, les femmes achètent la moitié des guitares électriques vendues aux États-Unis. L’entreprise Fender a même réorienté ses campagnes de marketing pour accroître l’attrait pour les femmes.

Les changements se produisent en vagues. Nous devons continuer d’aller de l’avant pour poursuivre sur cette lancée. ~Bobbi Jo Hart

Les changements ont aussi besoin d’une étincelle. Je souhaite que ma fille et que toutes les filles aient des personnes à qui s’identifier. C’est important qu’elles voient des femmes fortes réaliser de grandes choses. Ma fille a 16 ans et elle est musicienne, et en ce moment elle découvre Fanny.

À cet égard, le rôle du film est de braquer les projecteurs sur ces femmes admirables qui se voient à l’écran avec les cheveux gris en train de jouer du rock. Nous devons continuer d’aller de l’avant pour poursuivre sur cette lancée.

Crédit photo : Linda Wolf

Comment les membres de Fanny voient-elles leur carrière à présent?

Elles sont surexcitées de recommencer à jouer de la musique et à produire des disques. De voir des personnes les découvrir maintenant me donne encore la chair de poule. Une partie importante de ce que j’ai accompli consistait à bâtir des relations intergénérationnelles en incitant des artistes à l’avenir prometteur à faire des reprises des chansons de Fanny. Brie Darling est âgée d’un peu plus de 70 ans. Ruby Ibarra (une rappeuse philippino-américaine) a dans la vingtaine. Elles réaliseront une collaboration rock’n’roll. C’est ce que je leur souhaitais, qu’elles soient en mesure de remonter sur scène et de jouer.

De voir des personnes les découvrir maintenant me donne encore la chair de poule. ~Bobbi Jo Hart

Le nouvel album comprend une chanson intitulée Lured Away qui contient les paroles « I’m not starving/But I’m kinda hungry » (« Je ne suis pas affamée/Mais j’ai une petite faim »). La chanson concerne le fait de se faire attirer de nouveau vers ce qu’on aime. Dans ce cas, c’est la musique. Mais c’est aussi une chanson très évocatrice pour quiconque croit que son heure est passée dans la vie. Elle s’adresse à tout le monde, peu importe l’âge. Quand on se fait attirer une nouvelle fois vers sa passion, il faut croire que l’on peut réussir. Cette chanson est super.

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